Enfant, imaginer la vie. Une salle d’attente, immense et vide. L’enfant est libre, ne le sait. Il rêve d’une flèche taillée par le temps, embellie de plumes apaches, de fleurs, plantée dans le noir des ans.
De sa pointe fouiller, faire surgir la merveille des merveilles. Un aveuglant amour dans sa chambre-monde. Seul compte le vertige. J’y suis. Borges sur le même banc que l’enfant, à côté de lui-même, jette une pièce d’or au fleuve.
Retrouver l’infini, affronter la blouse blanche ou grise, corps tremblant, thermomètre et seringue pleine d’un philtre inconnu. Mixture perdue dans le gouffre de l’histoire. N’éprouver ni tristesse, ni nostalgie. Aimer, le secret de l’enfant.
texte et dessin (Enfant du goulag, v. 1939-40 ; Child (and her mother), d’après D. Lange, Wapato, Yakima Valley, Washington, août 1939 ; graphite, pierre noire, 24/02/20) ©JJM