Lentement

L’ordinateur n’en peut / Mais de ce bricolage / Et je laisse peu à peu / Doux effet de son âge

Puissant ordonnateur / D’un temps incalculable / Où le brouillon des heures / Coule comme du sable

S’éteindre lentement / Une voix éphémère / Qui oh jamais ne ment / Jusqu’à se perdre en mer.

Photo : Canal du Midi, 28/11/22, 12:12, rien de rien ©JJM

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Profondeur

Les idées noires sont / Os à ronger sucer / Bouche en feu adoucie / Par le suc de l’espoir

Si belles ruminées / Cœur blessé de la vie / Larmes d’encre de Chine / Éclats de pierre noire

Cybèle voilée de blanc / Sous les paupières closes / Où les couleurs tournoient / Fusionnent en remous

Elles sont moi je le sais / Mon combat de lumière / Cerbère hors de son trou / Triple gueule aboyant

D’elles seules se nourrit / La force de lutter / Au plus profond de soi / Où danse amour joyeux.

Vertige et profondeur Chute au fond d’un reflet Tu trouves sur un visage Le ciel qui est en toi.

Photo : Grand-Rond, 26/11/22, 15:53, rien ©JJM

Le refrain

O Cecità del Misero / Mortale bien entendu / Le péché le pardon / La vie ne suffit pas

Cécité mutité / Le temps coule incertain / Et l’heure délicate / Est l’étau des entrailles

Qu’as-tu fait qu’ai-je fait / Ne saurai-je donc rien / Nuit tombée d’un seul coup / Au moment solennel

De la porte clouée / Par un silence vain / Tu t’éloignes d’un pas / Je m’égares en chemin

L’heure est si délicate / Le silence tel abîme / Qu’en un frisson de lune / Je chante un vieux refrain

Les idées noires sont / Os à ronger sucer / Bouche en feu adoucie / Par le suc de l’espoir

Photo : Nature morte, Pablo Picasso, 29 janvier 1922, Beaubourg, 25/07/18, 17:18, rien ©JJM

Aurore

Ciel en feu me ravit / De braises la banquise / Déployant l’à venir / Écho de l’origine

L’absence des oiseaux / Le silence des cyprès / L’être frigorifié / Filant vers le divin

Ce rien que nul n’atteint / Échappé du soleil / Séisme matinal / De l’univers naissant

Fêlure de l’humain / Le corps las dépassé / Par d’invisibles ailes / Éternité rougie

Sur les parois noircies / De la suie de l’esprit / Dansant à peine aurore / Gravée sur la rétine.

Photo : Ciel des cyprès, 26/11/22, 07:51, rien ©JJM

Le Violent

Qui n’a subi violence / Ne sait ce qu’enfant sait / Ou femme quelle souffrance / Ou l’homme aussi blessé

Dépouillé de l’humain / Par la bêtise crasse / Et frappé de disgrâce / Ni animal ni saint

Balloté par l’ubris / Dans le chaos vidé / De toute liberté / Aveuglé par le vice

De l’autre et de lui-même / Ignorant aviné / Quand des coups assénés / Il tire ce qu’il aime

Mais la nuit taraudé / Par le mal qu’il a fait / Oh l’espoir qui lui reste / Est rongé par son geste.

Photo : Le Violent, 1495, Albrecht Dürer, expo. « Le théâtre des émotions », m. Marmottan-Monet, 30/07/22, 13:01, rien du 25/11/22 ©JJM

Le ballon

Que me veut cet enfant / Surgi de nulle part / Que je croise partout / Ballon crevé en main

Rien absolument rien / Que me dit cet enfant / Sans mot avec ses mains / Ses yeux écarquillés

Tout résolument tout / À moi qui n’entends rien / Que l’écho d’un silence / Théâtre d’Épidaure

De mes nuits archaïques / Lorsque sortant du rien / Je tentais de chanter / Avant que de parler

Son ballon est crevé / Sans cela à quoi bon / Te prendre dans mes bras / Et t’aimer oh aimer.

Photo : « Jardins publics : fillettes jouant », détail, rien bis, 24/11/22n 23:25 ©JJM

Consolation

L’enfant tient serré son ballon / Triste mine le regarde le jette / Au sol le ballon est flasque / Il descend de son vélo

S’approche et le ramasse / Il dit Tu vas voir je vais le / L’enfant ébauche un geste / Hésite prend peur ses mains

Se figent ses yeux s’affolent / Il lui sourit tourne en tout sens / Le ballon voilà ce n’est rien / Il s’attelle à la tâche en un rien

De temps le ballon est gonflé / Rebondit haut il le lance en / L’air en riant Tu vois ça y est / L’enfant secoue la tête non

Il attrape le ballon lui plante / Plein cœur un bout de bois / Le serre l’embrasse s’en va ballon / Crevé le lance devant lui le rattrape

Et l’embrasse joyeux oui apaisé / Il a du mal à respirer continue son / Chemin en poussant le vélo tout / Là-bas l’enfant console son ballon.

Photo : « Jardins publics : fillettes jouant », 1894, repris en 1936, Édouard Vuillard, m. d’Orsay, 23/07/21, 11:26, rien ©JJM