Au loin

La nuit si propice à l’étrange / donne au petit jour de belles / et inquiétantes teintes têtues / frappant à la vitre d’un esprit

embrumé ; et je titube hissé / au sommet où le vent vrille / dans le tourbillon des êtres / affolés alors que se répand,

au pied d’un à-pic fait d’os, / l’incendie de la médisance, / de la violence pure. Volant / parmi les oiseaux bleus de

l’espérance je bois enfin l’air / du jour aux parfums de nuit / passée à douter de tout hors / vive nécessité de se mettre

en marche au moment où, / le sommet du crâne en feu, / j’imagine le ciel accueillant / d’un regard aimant, au loin.

Photo : « Une ville sur un rocher », v. 1816-1824, Atelier de Francisco de Goya y Lucientes – Felipe Arroyo Valdès, expo. Goya, Agen, 02/02/20, 12:42, aparté ©JJM

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Chant de rien

Au titre de poète, / préfère celui d’auteur, / au mot de créateur, / du bricoleur la fête,

à celui de poème, / le plus modeste texte. / Tout ceci n’est que chant / dont un oiseau est roi.

Mais je n’y suis pour rien / si dès potron-minet, / après noire insomnie, / en moi mots se chamaillent,

ne me laissent en paix / que ne les aie fouettés / tel en neige blancs d’œufs, / et tenté de les peindre,

comme enfants les coquilles, / et je d’enfant toujours, / aimant une princesse, / j’écris peine et plaisir,

mais aussi la douleur / du deuil et de l’exil / ou bien de l’abandon, / et la joie du matin

après nuit de naufrage, / et le bonheur subtil / de te parler sans fin, / de ta peau, de tes mains.

Tout cela n’est que chant / dont tout oiseau est roi, / à qui s’offre le ciel, / sans effort, d’un coup d’aile.

Photo : Jardin du Palais-Royal, Paris, 29/07/22, 18:06, aparté ©JJM