La tendresse des abeilles

Illusion, dedans, dehors, jeter un regard,
à terre, trottoir sali, siècles de soleil brûlant,
de pluie torrentielle, murs fringants, fenêtres
aux reflets d’oubli. Tous les visages cachés

derrière les rideaux ajourés, motifs au crochet,
moulin, chat, tourterelle, arbres jaunis, lune.
Ni pessimisme, ni optimisme, être là, dans
l’entre-deux du début et de la fin, sautillant

d’une joie organique, toujours suspendu,
être, non-être, allez, lever les yeux, vers.
Frôler le rien, la frontière, danser sur un fil
de soie, embrasser, que tu es belle, oh oui.

Le reste est farce bleue, mensonge innocent,
tu sais bien. Je n’ai voulu ni ci, ni ça, pardon.
Alors repli, refuge, mais nulle part où aller.
La ville est accueillante, offerte, et les rues

tissent une vie, maillage de pas sans fin, tout
est là qui m’assaille, j’habite ici, c’est tout.
Dire non, encore et encore, depuis toujours.
Dire non au fiel, non à l’abandon, non aux

promesses, naïves, vidées par le ressac.
Souviens-toi de l’enfant, fond du lit trituré,
du visage en allé, du corps jeté à l’océan.
De l’écroulement du monde, de l’illusion

du vide, à chaque pas devant, là, devant.
Croire est un abîme, suis-je mon ennemi.
Fermer, refuser les regards et les rires, non.
L’amour même, gaspillé, incendié, dire oui.

Le paysage flambe, fleuves secs, sans larmes.
Les animaux sont perdus, errants, ils fuient.
Les montagnes blessent le ciel, et les oiseaux
cherchent où nicher, où chanter, tout refaire.

Assez de ces rejets, l’amour jamais ne s’éteint.
Ou alors il n’est rien. En quelle partie secrète
sera sauvée la tendresse des abeilles, et dans
quel puits magique, y a-t-il un puits, les yeux.

Personne ne sait, des illusions la plus belle.
Atteindre la nudité, accepter, ouvrir, ne plus
se cacher, balayer tous les mots, vieux, usés.
Flotter sans lien, plonger, fleuve de vie, toi.

02 06 16. Inachevé 5

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